Ethnobotanique

De tous temps, en Cévennes comme ailleurs, l’Homme pour répondre à ses besoins s’est tourné vers le monde végétal qui l’entourait, que ce soit pour l’alimentation, l’entretien de la santé ou d’autres usages comme la confection de vêtements, d’outils, de parfums…

Cette nécessité du quotidien a conduit à tisser des relations intimes avec ce qu’on appelle aujourd’hui la biodiversité, alors même que sa conservation est devenue l’objet de préoccupations aigües. Dans la crise écologique que nous connaissons aujourd’hui, s’il est essentiel d’apprendre à connaitre les espèces rares et remarquables, il est tout aussi nécessaire de retrouver ces liens sensibles avec une nature plus ordinaire. C’est ce qui est proposé dans la rencontre avec les végétaux sauvages, ceux qui vivent tout près de l’homme et dont on a oublié la valeur en tant que ressource abondante et renouvelable.

Les plantes messicoles

C’est dans le cadre de mon travail de formatrice dans l’enseignement agricole que je me suis intéressée aux plantes sauvages compagnes des champs de céréales, les messicoles, une flore remarquable encore bien présente sur nos causses lozériens.

Voici un extrait d’un article que j’ai écrit il y a quelques années pour présenter cette thématique méconnue des plantes messicoles aux lecteurs de la revue « l’Encre Verte » :

« A l’image des animaux que l’on qualifiait de « nuisibles » dans des temps révolus, il est des herbes que l’on dit « mauvaises » parce qu’elles poussent au coeur des cultures où le sauvage n’a pas droit de cité. Certaines d’entre elles, les messicoles, se sont fait une spécialité du champ cultivé de céréales, c’est le cas du bleuet, du coquelicot ou de la nielle des blés. Oubliées des listes de protection officielles, elles ont été longtemps négligées par les naturalistes, qui préféraient s’intéresser aux espaces moins « artificialisés ». Il faut dire que ces plantes sont pour la plupart des « étrangères » : passagères clandestines de l’agriculture, leurs graines se sont mêlées aux grains de céréales ; elles nous viennent ainsi du croissant fertile (Moyen-Orient) ou des espaces peu à peu gagnés par la révolution néolithique. Aujourd’hui leur statut est ambigu : elles trainent derrière elles un parfum d’indésirables, bannies par l’idéologie du « champ propre », et elles font dans le même temps partie intégrante de notre patrimoine culturel, évoquant souvenirs champêtres colorés et tableaux impressionnistes. Signe des temps, la gracile silhouette du coquelicot est aujourd’hui convoquée de façon récurrente dans les images voulant évoquer la biodiversité. Aujourd’hui le constat est fait de la menace de disparition qui pèse sur certaines de ces compagnes des moissons : si le coquelicot commun et le bleuet se portent encore bien, d’autres comme la nielle des blés, l’adonis ou l’aspérule des champs sont devenues rares.»

Les noms des plantes

Une herbe folle en fleurs

entendant son nom

je la vis d’autre manière

Teiji

Un atelier pour prendre le temps d’observer les plantes avec une loupe de terrain ou une loupe binoculaire (émerveillement garanti en entrant dans cette autre dimension), apprendre à repérer les grandes familles végétales pour s’y retrouver dans la jungle végétale, puis à reconnaître les espèces avec une flore.

Savoirs

« L’espèce humaine a besoin des plantes, spécialement à notre époque où l’environnement se détériore ; c’est pourquoi, sous une forme ou sous une autre, officielle ou parallèle, la connaissance des plantes resurgit dans notre société malgré les bouleversements qui la secouent, comme un pissenlit ressort de terre toujours au même endroit, malgré les labours  […] C’est la plante entière, des racines aux fleurs, dans son terroir, et avec les usages qui ont été les siens au cours des âges, dont la connaissance nous est nécessaire, parce que nous avons besoin de la percevoir avec nos sens, pas de façon intellectuelle et dévitalisée. »  

Francis Hallé, Eloge de la plante, 1999

Une approche botanique et écologique : observer les plantes avec une loupe binoculaire, apprendre à repérer les différentes familles végétales puis à déterminer les espèces avec une flore.

Une approche ethnologique : enquêter pour collecter les savoirs, les savoir-faire et les valeurs des hommes et femmes d’un territoire autour du monde végétal : sur la vie des plantes, sur leurs vertus et usages dans la vie domestique, mais aussi sur la part de rêve et de poésie et de symboles qu’elles portent avec elles.